Autor: Jean de la Fontaine
Deux Mulets cheminaient, l\'un d\'avoine charge,
L\'autre portant l\'argent de la Gabelle.
Celui-ci, glorieux d\'une charge si belle,
N\'eut voulu pour beaucoup en etre soulage.
Il marchait d\'un pas releve,
Et faisait sonner sa sonnette:
Quand l\'ennemi se presentant,
Comme il en voulait a l\'argent,
Sur le Mulet du fisc une troupe se jette,
Le saisit au frein et l\'arrete.
Le Mulet, en se defendant,
Se sent percer de coups: il gemit, il soupire.
\"Est-ce donc la, dit-il, ce qu\'on m\'avait promis?
Ce Mulet qui me suit du danger se retire,
Et moi j\'y tombe, et je peris.
- Ami, lui dit son camarade,
Il n\'est pas toujours bon d\'avoir un haut Emploi:
Si tu n\'avais servi qu\'un Meunier, comme moi,
Tu ne serais pas si malade.\"